CEIJA STOJKA

La Maison Rouge (Paris 12ème) présente le travail de Ceija Stojka. Cette artiste rom autrichienne témoigne des camps de concentration auxquels elle a survécu. Ce récit, par le biais de la peinture, est d’autant plus poignant qu’il est précédé des doux paysages verdoyants de son enfance : ces plaines et forêts traversées en roulotte avec sa famille. Une peinture très figurative, quelque peu naïve, où des couleurs gaies  posées en aplat, retranscrivent ses visions d’enfant.  « Quand on roulait » participe d’un romantisme certain. La nature est belle et lumineuse.

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Des yeux d’enfant qui doivent cependant finir par se dérober derrière des buissons obscures pendant « la traque ». Cette troisième salle ainsi intitulée mène à la quatrième « Auschwitz », et à la cinquième « Ravensbrück », puis à la sixième « Bergen Belsen ». Ceija Stojka peint des objets, symbols de cet univers concentrationnaire : des bottes de SS en particulier. Elle use d’une géométrie qui donne à concevoir sa radicalité : des silhouettes rangées, des baraquements rectangulaires, des délimitations rectilignes au fil barbelé : la simplicité du trait ou la carte postale d’un sombre moment de l’histoire.

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La peinture de Ceija Stojka faite de détails minutieusement rendus en dit autant que les étendus désertiques d’Anselm Kiefer : l’inhumain, le monstrueux, le diabolique que porte en elle la nature humaine.  Ce saisissant travail de mémoire est quelque peu perturbant, à l’image de l’art brut déjà exposé par la Maison Rouge : la condition humaine y est révélée sans détour. Ce parcours thématique et chronologique s’achève cependant, et contre toute attente, sur des champs de tournesols, des verts potagers, des campagnes fleuries, des ciels azurs, … sur une ôde à la vie, en somme.

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Ainsi, si on ne devient par artiste en croquant des paysages pendant ses congés et si on ne devient pas critique d’art en parcourant des expos le dimanche, on peut trouver dans l’exercice d’un art, et ce sans apprentissage, une manière bien à soi d’être au monde, une voie d’accès à la vérité, la sienne en particulier, si ce n’est comme ici, celle de l’Histoire.

www.lamaisonrouge.org