La femme, c’est l’être de l’accessoire. Martial RAYSSE la représente ainsi dans ses tableaux, ou plutôt, soyons précis, dans ses montages et collages : La France Verte (1963), Peinture à haute tension (1965), Portrait de Mme VDK (1962). En effet, le visage féminin y est toujours accessoirisé d’une fleur, d’un néon, d’une mouche…
Cette série de portraits n’est pas un hymne à la féminité, mais une critique virulente, quoique poétique, de la société de consommation. La femme en serait-elle la première victime ? C’est en effet à la femme qu’il appartient de se parer et de se maquiller. Cette « appartenance » est devenue une obligation, comme si se truquer était dans la nature de la femme (il trucco : le maquillage en italien). La femme moderne est une femme plastique. Par cette considération, ou plutôt, soyons précis, cette dénonciation, Martial RAYSSE, en tant qu’artiste plasticien joue son rôle avec tact et perfection.
Ce qui nous amène à porter un tel regard sur ces portraits de femme, ce sont les présentoirs du Prisunic qui les précèdent : Etalage, hygiène de la vision et Etalage de Prisunic (1961). Où le musée est le lieu des objets hors contexte et pas seulement des objets d’art, boîtes de conserve, paquets de sucre, de sel, de pâte, apéritifs, sirops, produits ménagers, et objets divers en plastique forment des compositions réalistes quant à la société de consommation. Ces « sculptures » sont un segment de l’esthétique de la consommation. La femme en est un autre bien plus tragique.
L’usage du néon, mais aussi des fonds fluorescents sur lesquels posent des pin-up, participe de cette même esthétique. The Raysse beach en témoigne d’une manière flamboyante. Le fluo, un autre accessoire de la femme objet, ne traque pas la vie. Il fait ressortir tout ce qu’elle a d’artificiel et de dénaturant.
Par Life is so complex, Martial RAYSSE poursuit la même dénonciation, mais là, on ressent sa fureur et peut-être même son désespoir. Dans cette composition de plexiglas découpé qui n’est autre qu’un visage de femme morcelé, l’artiste se met à la place de cette société de consommation perverse et meurtrière. Comme elle, il déstructure, il découpe, il maquille ce qu’il y a de plus intime et de plus féminin : le visage, le miroir de notre âme et le témoin de notre identité.
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